Accueil > Champs d’action > Accords de libre-échange > Accord général sur le commerce des services (AGCS), (...) > Développements concernant le « US Gambling Case » - mai 2007

Développements concernant le « US Gambling Case » - mai 2007

Publications, 22 mai 2007

Bref résumé de ce qu’enseignent les cas de jurisprudence de l’AGCS

Le “US Gambling Case” (*nouveaux développements à lire en bas de page)

Le cas concernant les jeux d’argent et de hasard aux États Unis, appelé US Gambling Case, démontre les dangers pour les États de prendre des engagements ouverts dans l’AGCS, dans le secteur des services, sans en connaître toutes les répercussions. Dans le litige opposant Antigua-Barbuda aux Etats-Unis concernant les lois qui interdisent le « remote gambling » (gambling par Internet) aux États-Unis, le plus important à retenir est ceci. L’Organe de règlement des différends (ORD) de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) a :

1- jugé que les jeux de hasard faisaient partie des engagements pris par les Américains dans le secteur : Autres services récréatifs, sans qu’ils ne l’aient voulu ou que cela ait été leur intention ! Cela signifie que d’autres gouvernements ont pu et peuvent continuer de prendre des engagements sans en avoir l’intention de manière absurde dans ce type de catégorie.
2- conclu que l’AGCS requiert que les règlements d’interdiction (interdire une activité pour des motifs environnementaux par exemple) concernant les fournisseurs nationaux comme ceux de l’étranger soient éliminés lorsqu’un gouvernement s’engage à ouvrir un marché de services (cela même si ces règlements ne sont pas spécifiquement identifiés dans l’AGCS comme des obstacles au commerce).

La majorité des élus, du palier municipal au fédéral, croient à tord qu’en autant qu’une réglementation est non-discriminatoire , concernant le zonage par exemple, elle n’est pas menacée. Dans ce jugement, l’Organe d’appel de l’OMC a pourtant insisté sur le fait que les dispositions de l’AGCS concernant l’accès au marché vont plus loin et interdisent certaines mesures gouvernementales “qu’elles soient discriminatoires ou non” . L’article XVI de l’AGCS garantit même que lorsque des engagements sont pris, certaines mesures - même de droit criminel - qui limitent l’accès au marché devront être retirées. Il ne dit même pas “en autant que cela ne conduise pas à des activités criminelles”.

L’affirmation mille fois répétée par les gouvernements des États-Unis et du Canada à l’effet que l’AGCS reconnaît le droit des Membres de réglementer la fourniture de services sur leur territoire et d’introduire de nouvelles réglementations afin de répondre à des objectifs de politique nationale s’avère anéantie par ce jugement. L’ORD y a indiqué clairement que le droit de réglementer des gouvernements s’arrête là où commencent les droits commerciaux des membres de l’OMC. « Cette décision est “un précédent terrible”, indique le professeur Steve Charnovitz de la George Washington University Law School. Elle donne raison aux opposants de l’OMC à travers le monde qui disent depuis des années, et je croyais à tort, que l’AGCS est une menace pour les lois intérieures adoptées démocratiquement. » En conséquence, toutes les réglementations américaines qui interdisent telle ou telle chose aux fournisseurs de jeux de hasard établis aux États-Unis sont maintenant vulnérables et pourraient faire l’objet d’une poursuite à l’OMC parce qu’elles imposent des limites à l’accès au marché et/ou privilégient les fournisseurs nationaux. Dans tous les pays membres et donc au Canada, cette interprétation met en péril des règlementations existantes et pourrait restreindre le champ d’action des gouvernements.

Ce jugement n’a pas attiré l’attention parce que l’Organe d’appel de l’OMC a permis aux États-Unis de justifier leur violation des règles de l’AGCS en recourant aux clauses d’exception. Mais il faut savoir que les clauses d’exception ont rarement été utiles aux gouvernements tentant de defendre leurs législations à l’OMC. De plus, s’en remettre aux clauses d’exception, c’est retirer aux élus le pouvoir de juger si une réglementation est nécessaire ou non, pour remettre ce pouvoir entre les mains des panels de l’OMC. Tout cela implique aussi que les gouvernements ne comprenaient pas, fondamentalement, ce à quoi ils donnaient leur accord lorsqu’ils ont pris des engagements dans le cadre de l’AGCS. Le savent-ils alors que se déroule le blitz final de négociations de l’AGCS dans le cadre du cycle de Doha ?

Le contenu de ce texte a été traduit et adapté de : Lessons from the US-Gambling Case : How the GATS Undermines the Right to Regulate, par Ellen Gould, Centre canadien des politiques alternatives.
Voir : http://www.policyalternatives.ca/Reports/2005/11/GatsAndGambling/


Développements en date de mai 2007

Référence :
http://www.ustr.gov
Recherchez le communiqué du 4 mai 2007

Plutôt que de changer leurs lois concernant les jeux de hasard sur Internet, suite au jugement de l’OMC l’exigeant (résultat du litige opposant Antigua-Barbuda aux Etats-Unis concernant les lois qui interdisent le « remote gambling »), les États-Unis cherchent à corriger leur liste d’engagements et à retirer ça de là.

Rappelons que les jeux de hasard sur Internet ont été vus comme faisant partie des engagements pris par les Américains dans l’AGCS, dans le secteur : Autres services récréatifs, sans qu’ils ne l’aient voulu ou que cela ait été leur intention. Comme quoi même le pays le plus puissant du monde a pu faire une erreur (la faille dont profitent ensuite des intérêts privés cachés derrière les pays qui intentent la poursuite à l’OMC) dans ses listes complexes où les pays soumettent ou non des services à la libéralisation dans l’AGCS.




ATTAC-Québec