Accueil > Médias > Communiqués des coalitions > Rencontre trinationale à Mexico sur l’ALÉNA : (...)

Rencontre trinationale à Mexico sur l’ALÉNA : communiqué et déclaration finale

Communiqués, 31 mai 2017

Plus de 300 personnes représentant différentes organisations sociales du Québec, du Canada, des États-Unis et du Mexique ont complété, le week-end dernier dans la ville de Mexico, des discussions concernant la renégociation de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALÉNA). Cette rencontre se produisant en même temps que la ministre canadienne des Affaires étrangères, Chrystia Freeland, rencontrait le secrétaire mexicain des Affaires étrangères, Luis Videgaray. Lire le communiqué du Réseau québécois sur l’intégration continentale (RQIC) et la Déclaration finale qui suit, une prise de position forte qui indique clairement ce que tout traité et processus de négociation d’un accord comme l’ALÉNA doivent être. Sur la photo au micro : Claude Vaillancourt d’ATTAC-Québec (photo : Denise Gagnon/FTQ).

Texte de la Déclaration finale

Les personnes participantes à la rencontre des organisations sociales du Canada, des États-Unis et du Mexique, face à l’amorce imminente du processus de renégociation de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALÉNA), condamnent ce modèle qui a gravement affecté le développement national, étant contraire aux intérêts des peuples, de l’environnement et de notre système démocratique. En outre, les accords de libre-échange ont échoué sur le plan politique parce que les promesses et les attentes de prospérité ne se sont pas matérialisées pour les travailleuses et travailleurs des milieux ruraux et urbains, provoquant une sévère crise sociale.

Nous appelons à construire un nouveau modèle d’intégration, de coopération et d’échange entre les pays pour assurer la participation démocratique de la société en vue de la négociation d’un accord transparent dans tous ses termes et conditions et à promouvoir, sur la base de la coopération internationale et de la souveraineté de chaque pays, la reconstruction des chaînes de production nationales, régionales et locales, dans le respect des droits humains, politiques, économiques, sociaux, culturels et environnementaux. De plus, il doit garantir le travail décent et des salaires viables, sans distinction d’origine ou de statut migratoire.

Depuis la mise en œuvre de l’ALÉNA en 1994, les travailleuses et les travailleurs, les communautés et l’environnement dans les trois pays ont souffert, tandis que les investisseurs riches, les grandes entreprises et leurs dirigeants ont bénéficié de plus de profits et ont acquis plus de droits et de pouvoir. Ce pouvoir a eu un effet négatif sur nos démocraties.

Tout accord commercial doit inverser ces tendances indéniables et conduire à un développement durable et largement partagé dans toute l’Amérique du Nord.

Jusqu’à présent, les signes ne sont pas encourageants qu’un nouvel ALÉNA contribuerait à répondre aux besoins des populations et des communautés nord-américaines et de l’environnement que nous partageons tous. Différents fonctionnaires aux États-Unis ont mentionné utiliser l’Accord de partenariat transpacifique (PTP) comme point de départ à la révision de l’ALÉNA, malgré la large opposition des travailleuses, des travailleurs et des communautés au PTP avec des arguments concrets et pour de bonnes raisons.

Les organisations et mouvements de la société civile et les communautés autochtones rejettent non seulement les détails techniques de l’actuel ALÉNA et ceux des accords de commerce subséquents menés par les États-Unis dans les Amériques, mais aussi les positions belliqueuses, militaristes, xénophobes et misogynes de M. Trump. Nous exigeons le plein respect du droit international et de la non-ingérence afin d’assurer la paix mondiale.

Nous nous opposons à tout mur frontalier en Amérique du Nord et défendons les droits humains et professionnels des personnes migrantes ainsi que leur droit de ne pas être forcés de migrer pour des motifs de pauvreté et d’insécurité.

Pour ces raisons, tout traité et processus de négociation doivent :

1. Procéder à travers un processus transparent, pluriel et démocratique, impliquant la population et le pouvoir législatif de chaque pays.

2. Inclure, dans le texte de l’accord, des normes claires et efficaces, contraignantes et exécutoires, avec des délais déterminés, concernant le travail et de l’environnement, qui respectent et vont au-delà des normes internationales établies.

3. Éliminer les privilèges faits aux investisseurs étrangers, ainsi que le mécanisme de règlement des différends entre les investisseurs et l’État (Investor-State Dispute Settlement - ISDS) et respecter le droit des peuples à exercer un contrôle démocratique sur les politiques publiques dans chaque pays.

4. Établir des normes contraignantes pour assurer la prééminence des droits humains sur la base des accords et pactes internationaux.

5. Instaurer des politiques globales de genre qui garantissent l’égalité et la non-discrimination en tant que principes transversaux ainsi que la participation active des femmes dans toutes les sphères de la vie.

6. Garantir la participation et le consentement préalable et informé des communautés et des peuples autochtones, afin de respecter la souveraineté des peuples sur leurs ressources, leurs territoires et leur culture.

7. Inclure des mesures, dans la législation et dans les pratiques, qui augmentent les salaires et l’accès à l’emploi décent dans les trois pays, et qui font la promotion de la démocratie syndicale, de la liberté d’association et de la négociation collective transnationale, dans les cas où un employeur opère dans deux ou plusieurs pays.

8. Garantir une éducation publique gratuite en tant que droit social, indispensable à la construction de sociétés socialement justes et démocratiques et pour l’émancipation de nos peuples. L’Éducation doit être exclue des accords de libre-échange, n’étant pas une marchandise.

9. Promouvoir une politique industrielle en Amérique du Nord, qui protège efficacement la production partagée, en augmentant les exigences quantitatives et en resserrant les exigences de surveillance et de contrôle afin de garantir l’origine nord-américaine des composants dans les industries clés.

10. Sauvegarder la souveraineté alimentaire, les mécanismes de gestion de la production et les moyens de subsistance en milieu rural et le droit de savoir ce qui est dans notre nourriture, comment et où elle est produite.

11. Garantir la prestation de services publics de qualité : l’éducation, la santé, la sécurité sociale, l’énergie, l’eau, les marchés publics, etc. ; protéger les droits des nations à étendre la propriété publique des ressources et des services.

12. Inclure des engagements partagés en faveur des droits des travailleuses et des travailleurs migrants et des populations autochtones et renforcer les mécanismes exécutoires pour les protéger, incluant le droit de constituer des organisations syndicales.

13. Rejeter les chapitres de la propriété intellectuelle et du commerce électronique, en raison de la violation des droits à la liberté d’expression, à la vie privée et à l’accès à la connaissance et médicaments.. Préserver un Internet libre et complètement ouvert, éviter de criminaliser les utilisateurs finaux et empêcher que le droit d’auteur ne devienne un mécanisme usuraire.

14. Inclure des engagements partagés, dans les trois pays, pour améliorer l’infrastructure publique et la soutenabilité, en faisant la promotion de la justice fiscale, par une imposition juste, équitable et progressive des bénéfices.

15. Inclure de fortes obligations contraignantes et exécutoires pour lutter contre le changement climatique, la déforestation, la contamination de l’air et de l’eau, les émissions de gaz à effet de serre et pour préserver la propriété sociale des forêts, des terres, de la biodiversité et de l’eau. Chaque pays doit être contraint de remplir sa contribution nationale définie dans l’accord de Paris sur le climat.

Les organisations de la société civile en Amérique du Nord n’accepteront pas un ALÉNA toxique et collaboreront, au-delà des frontières, pour surveiller, contrôler, mobiliser, éduquer et plaider afin d’exiger que ces objectifs soient atteints.

Nous renforcerons notre engagement à travailler ensemble et mettre en œuvre un plan d’action trinational ; incluant des manifestations, des campagnes, des mobilisations, des déclarations politiques et en utilisant toutes les ressources juridiques, politiques et de plaidoyer pour réaliser un nouveau modèle de commerce qui mette les peuples et la planète avant les profits des entreprises.

Sur la base de ce qui précède, nous appelons les peuples des trois pays à construire un mouvement large et diversifié, à élaborer des stratégies de mobilisation, des propositions et un dialogue politique pour parvenir à un plus grand impact sur le cours de la mondialisation, des politiques publiques et sur la construction d’alternatives de développement durable.

Mexico, le samedi 27 mai 2017

1) Cette Déclaration fut unanimement approuvée dans ses termes généraux par les personnes participantes à la Rencontre des organisations sociales du Canada, des États-Unis et du Mexique, les 26 et 27 mai 2017.

Source : site du RQIC




ATTAC-Québec