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ATTAC-Québec signe la nouvelle déclaration d’unité du réseau Our world is not for sale

1er décembre 2005

Source : http://www.ourworldisnotforsale.org/about.asp?about=signon&lang=french
Signataires : http://www.ourworldisnotforsale.org/signees_ns.asp

STOPPONS LA MONDIALISATION DES ENTREPRISES :
UN AUTRE MONDE EST POSSIBLE !

Une déclaration d’unité du réseau
NOTRE MONDE N’EST PAS À VENDRE

INTRODUCTION : NOTRE DÉFI

« Notre monde n’est pas à vendre » est un réseau mondial d’organismes, d’activistes et de mouvements sociaux qui s’opposent aux ententes commerciales et aux accords d’investissement qui favorisent les intérêts des sociétés les plus puissantes du monde au détriment des personnes et de l’environnement.
La vision que nous opposons à ce processus de mondialisation par les entreprises est celle d’une économie mondiale construite sur les principes de la justice économique, de la durabilité écologique et de la responsabilisation en démocratie, dans laquelle les intérêts des personnes sont plus importants que ceux des sociétés. Il s’agit d’une économie articulée autour des intérêts des vrais producteurs et des consommateurs, comme les travailleurs, les paysans, les familles agricoles, les pêcheurs, les petits et moyens producteurs ; une économie pour les besoins des personnes marginalisées par le système en place, comme les femmes et les autochtones.

Nous croyons qu’un système juste ne doit pas affaiblir mais protéger la diversité culturelle, biologique, économique et sociale ; qu’il doit privilégier le développement des économies et des activités commerciales locales saines ; qu’il doit assurer les droits environnementaux, culturels, sociaux et du travail qui sont reconnus à l’échelle mondiale ; qu’il doit soutenir la souveraineté et l’auto-détermination des peuples et protéger les processus démocratiques nationaux et sous-nationaux de décision.

La démocratie n’est pas simplement une question de tenir des élections. La démocratie signifie ne pas avoir à récolter le moins bon d’une série de valeurs, de priorités et de politiques uniques imposées par des organismes multilatéraux comme l’Organisation mondiale du commerce (OMC). La démocratie signifie ne pas se faire imposer des processus de décision qui ne sont pas transparents ni imputables, comme les processus de règlement des différends de l’OMC. La démocratie signifie que les personnes prennent le contrôle de forces qui ont une incidence directe sur leur vie.

Le préambule de l’établissement de l’OMC en 1995 déclarait que l’organisme avait pour objet d’augmenter la prospérité, d’accroître l’emploi, de réduire la pauvreté, de diminuer l’inégalité et de promouvoir le développement durable autour du monde en augmentant le « libre-échange ». Dix ans plus tard, il est clair que l’OMC a échoué et produit des résultats complètement opposés.

Le régime commercial de l’OMC a neutralisé des mesures qui favoriseraient le développement, soulageraient la pauvreté et aideraient à assurer la survie humaine et écologique, à l’échelle locale et mondiale. Sous prétexte de « libre-échange », les règles de l’OMC servent à forcer l’ouverture de nouveaux marchés et à les placer sous le contrôle des sociétés transnationales.

En outre, les grands pouvoirs commerciaux ont utilisé l’OMC pour promouvoir et consolider le contrôle transnational des activités économiques et sociales par les sociétés dans d’autres secteurs que le commerce, notamment dans le développement, l’investissement, la compétition, les droits de propriété intellectuelle, la prestation des services sociaux, la protection de l’environnement et les marchés publics.

La libéralisation à grande échelle dans ces secteurs va forcer les pays en développement à renoncer à un grand nombre des outils de développement économique que les pays industrialisés ont utilisé pour construire leurs économies et créer des emplois. De plus, les dispositions existantes de l’OMC, comme celles qui sont en train d’être négociées, auraient pour effet de « perpétuer » les « programmes d’ajustement structurel » de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international.

De plus, en favorisant les intérêts des grandes puissances commerciales, les méthodes de gouvernance et de décision qui sont utilisées à l’OMC sont notoires pour être fondées sur la menace, la tromperie, la manipulation et le manque de transparence dans un processus non démocratique et non inclusif.
Ce sont les conséquences sociales, politiques et environnementales destructrices du modèle pro-entreprise et néo-libéral de mondialisation qui ont suscité la résistance croissante d’une vaste gamme d’organismes de la société civile et de mouvements sociaux du monde, y compris aux sommets de l’OMC à Seattle, Doha, Cancun et Hong Kong.

« Notre monde n’est pas à vendre » fait partie de cette résistance mondiale.

Dix ans après la fondation de l’OMC, il nous est devenu clair que les possibilités de voir l’OMC bouger dans le sens de réformes positives sont minimales, sinon inexistantes. Le changement est absolument nécessaire. Le système en place crée la situation suivante :

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les moyens de subsistance sont détruits, les droits de la personne ne sont pas respectés, la santé publique est mise en danger, l’environnement est pillé et les systèmes démocratiques sont érodés ;
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les économies locales sont affaiblies et les travailleurs, les paysans, les familles agricoles, les pêcheurs, les consommateurs, les femmes et les autochtones sont particulièrement désavantagés et exploités ;
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la capacité du gouvernement de garantir l’accès aux nécessités de la vie, de promouvoir la santé, la sécurité et la souveraineté alimentaires et de protéger la diversité culturelle et biologique est affaiblie et parfois éradiquée.

Autour du monde, les résultats négatifs du système économique mondial courant poussent les mouvements démocratiques - par le vote et dans la rue - à exiger du changement. Les élus de nombreux pays ont perdu foi envers le système courant de gouvernance économique mondiale. De plus en plus d’économistes et de technocrates qui ont créé et embrassé ce système commencent à le remettre en question parce qu’il donne des résultats tout à fait opposés à ceux qui étaient promis. Tout cela se produit dans le contexte de la croissance de l’inégalité entre les nations et à l’intérieur d’entre elles et de la résurgence du militarisme.
Il faut contrer les efforts de l’OMC qui cherche à imposer la libéralisation du commerce mondial d’une façon qui nuit à la justice économique, au mieux-être social, à l’égalité des sexes et à la durabilité écologique. Il faut réduire son pouvoir et son autorité dans de nombreux secteurs où ils ont été imposés, y compris l’agriculture, les services et les droits de propriété intellectuelle.

En même temps, nous devons concevoir de nouvelles institutions pour faciliter le commerce, la production et la distribution pour le bien commun si nous voulons éviter la possibilité croissante de la catastrophe sociale et écologique.

Le régime commercial courant, qui inclut l’OMC, en plus des accords régionaux et bilatéraux de commerce et d’investissement, doit céder la place à un cadre commercial nouveau, socialement juste et écologiquement durable pour le 21e siècle.

NOS BUTS

Depuis 1998, les membres du réseau OWINFS ont combiné leurs forces pour partager des analyses, élaborer des stratégies et coordonner des actions à l’échelle internationale afin de promouvoir le développement de nouvelles économies, justes et durables.

Nous nous sommes engagés à élaborer un nouveau système de commerce qui comporte l’obligation de rendre compte en démocratie et qui préconise la justice économique, le mieux-être social, l’égalité des sexes et la durabilité écologique, et qui offre des emplois décents et les biens et les services dont tout le monde a besoin.

Nous appuyons le développement d’économies locales dynamiques et le respect des droits des travailleurs, des paysans, des migrants, des familles agricoles, des consommateurs, des femmes et des autochtones. Nous croyons que l’auto-détermination des peuples ne doit pas être subordonnée aux engagement commerciaux internationaux. Cela exige entre autres choses que les processus de décision et d’application à tous les niveaux de gouvernance soient démocratiques, transparents et inclusifs.

Nous reconnaissons qu’un système commercial international socialement juste doit accorder la priorité aux droits et au bien-être des travailleurs, des paysans, des migrants, des pêcheurs et des familles agricoles qui produisent nos biens, nos services et nos aliments.

Nous demandons aux gouvernements et aux organismes multilatéraux de ne plus attaquer les droits fondamentaux des travailleurs, de cesser d’essayer de reprendre aux travailleurs les gains qu’ils ont obtenus en luttant, de ne plus affaiblir la sécurité d’emploi, de mettre un terme à la course vers les salaires les plus bas et de renforcer les droits des travailleurs du monde entier.

Nous nous opposons aux accords de libéralisation du commerce et aux négociations qui veulent priver les collectivités autochtones et locales de l’accès aux ressources naturelles dont elles ont besoin pour subsister, afin de mieux le procurer aux entreprises.

Il faut également faire respecter d’autres droits fondamentaux, les promouvoir et les réaliser, en commençant par l’auto-détermination des peuples autochtones et la prestation des services sociaux de base comme l’éducation, la sécurité et la souveraineté alimentaires, l’accès universel à l’eau propre pour les êtres humains et la santé publique.

L’intégrité écologique doit aussi être l’un des objectifs d’un système de commerce mondial transformé. Cela signifie notamment qu’il faut réglementer le commerce et les investissements des sociétés afin de renverser le réchauffement de la planète ; il faut que les accords environnementaux multilatéraux l’emportent sur les accords commerciaux ; les normes environnementales ne doivent pas être affaiblies par les accords commerciaux ; il faut respecter le droit des personnes de rejeter les organismes génétiquement modifiés, préserver les vieilles forêts et la diversité des collections de semence des agriculteurs et promouvoir le bien-être des animaux.

LES IDÉAUX QUE NOUS DÉFENDONS

Soutenir le droit des peuples de choisir : auto-détermination, démocratie et développement

Nous réaffirmons le droit fondamental des pays d’élaborer des politiques économiques et industrielles qui favorisent le véritable développement économique, créent des emplois décents, protègent les moyens de subsistance et améliorent l’environnement. Tous les pays, et particulièrement les pays les plus pauvres, doivent avoir le droit d’utiliser des politiques (comme des politiques sur le contenu local) afin d’accroître la capacité de leurs propres secteurs de production, particulièrement les petites et les moyennes entreprises.Les pays doivent aussi préserver leur capacité (« espace politique ») d’élaborer des stratégies de développement économique, social et environnemental qui servent leurs plus vulnérables. La recherche de la « cohérence » entre les institutions internationales est devenue une façon de rejeter cet espace politique : le Fonds monétaire international, la Banque mondiale et certains pays donateurs individuels forcent les gouvernements à mettre en oeuvre des politiques néo-libérales que l’OMC et les autres accords commerciaux et sur l’investissement perpétuent. Par conséquent :

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« Notre monde n’est pas à vendre » exige qu’on mette un terme aux pratiques secrètes et coercitives qui sont devenues la marque des négociations commerciales, particulièrement à l’OMC, où quelques gouvernements puissants, agissant souvent au nom de leurs élites corporatives, sont capables de contraindre les gouvernements plus faibles à réaliser leurs objectifs.
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Il ne faut pas que le démantèlement des tarifs et certaines mesures commerciales mettent les économies locales, particulièrement celles des pays les plus pauvres, ou des secteurs économiques les plus pauvres, ou les deux, à la merci des sociétés transnationales ; cela ne doit pas menacer le développement économique local, les lois et les normes du travail, la santé et la sécurité publique et des consommateurs, et l’environnement.
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Il ne faut pas non plus que les négociations du « libre-échange » à l’OMC et ailleurs soient un cheval de Troie qui permet aux sociétés d’obtenir des règles en leur faveur sur l’investissement, la compétition, les marchés publics, l’accès aux marchés, la production agricole, la réglementation domestique des services et les droits de propriété intellectuelle. Il ne faut plus que la dynamique du pouvoir permette aux pays industrialisés riches d’imposer leur programme économique aux pays pauvres.
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Les recours à l’ajustement structurel et à la conditionnalité de la dette pour imposer la libéralisation du commerce dans les pays du tiers monde et ailleurs doivent cesser. Le Fonds monétaire international, la Banque mondiale et les banques régionales de développement doivent radier toutes les dettes des pays en développement/transition envers eux afin de permettre à ces pays de réaffecter ces fonds de façon à répondre aux besoins urgents de leurs citoyens.

Faire avancer la primauté des droits sociaux et de l’environnement

Nous croyons qu’il est essentiel pour la vie de protéger les droits sociaux et de les faire avancer, de répondre aux besoins fondamentaux et de protéger notre environnement. Il est inacceptable que les règles de l’OMC et des autres accords « commerciaux » affaiblissent cela. Par conséquent :

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Aucun accord commercial et d’investissement ne doit dominer ou affaiblir les accords internationaux qui favorisent la justice sociale, économique et environnementale, incluant sans toutefois s’y limiter :
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l’Organisation internationale du Travail (OIT), la Déclaration relative aux principes et droits fondamentaux au travail (couvrant les quatre principales normes du travail) ;

o

la Convention sur la diversité biologique et son Protocole sur la biosécurité et les autres accords multilatéraux sur l’environnement ;
o

la Déclaration des Nations Unies sur les droits de l’homme et ses conventions connexes : le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques ;
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la Déclaration anticipée des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones ;
o

la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes ; et
o

la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leurs familles.
o

Les gouvernements doivent conserver le droit souverain de déterminer comment réglementer les services de façon à répondre aux besoins de leur peuple, de leur économie et de leur société, en honorant leurs autres obligations internationales et constitutionnelles, y compris à l’égard des femmes, des autochtones, des jeunes, des vieux et des pauvres.
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Le droit des gouvernements d’adopter le principe de précaution pour protéger la santé publique, l’environnement et l’agriculture des risques inconnus doit l’emporter sur toutes les ententes et les dispositions commerciales.
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Il ne doit pas y avoir de réductions tarifaires qui nuisent à l’environnement ou au développement durable en augmentant le commerce inapproprié des ressources naturelles et des autres biens écologiques.
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Il faut stopper l’affaiblissement des Nations Unies par les institutions pro-entreprises créées en application des Accords de Bretton Woods, par l’OMC et par les grandes puissances et il faut renforcer le système des accords et des organismes des Nations Unies.

Protection des services essentiels

Nous adhérons au principe fondamental que les accords commerciaux ou d’investissement ne doivent pas enfreindre la souveraineté des gouvernements de garantir l’accès aux éléments essentiels de la vie, de promouvoir la santé et le bien-être de leurs peuples et de protéger l’environnement.Par conséquent :

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Les pays ne doivent pas être pressés d’accepter des règles commerciales qui diminuent cette capacité, que ce soit par l’entremise de l’Accord général sur le commerce des services (GATS) de l’OMC ou d’ententes régionales ou bilatérales.
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Les secteurs ayant directement trait à ces éléments essentiels, y compris la santé, l’éducation, le secteur culturel/audio-visuel, l’aide sociale, les services énergétiques et d’eau doivent être explicitement exclus de tous les accords commerciaux et d’investisssement.
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Les règles concernant la réglementation domestique, les subsides et l’acquisition des services par le gouvernement affectent cette capacité de par leur nature et ne doivent pas être incluses dans les accords commerciaux et d’investissement.

Les pays affrontent des pressions énormes pour les forcer à assujettir leurs services essentiels aux règles du GATS qui ont pour effet de promouvoir la privatisation. De plus, quand les engagements établis en vertu de ces règles sont adoptés par les pays qui ont été ou qui sont en train d’être déréglementés et dont les services essentiels sont privatisés par l’entremise des « exigences d’ajustement structurel », les règles du GATS servent à perpétuer la privatisation. Le GATS favorise ainsi l’ouverture des marchés locaux aux sociétés transnationales et l’avancement du modèle économique néo-libéral. Par conséquent :

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Il faut retirer ces « exigences d’ajustements structurels » et non les perpétuer, et elles ne doivent pas être une condition que les pays doivent respecter pour recevoir des subventions ou des prêts nouveaux, et les pays ne devraient pas être pressés d’assujettir leurs services essentiels aux règles du GATS.

Défense de la connaissance, de la culture et des formes de vie comme l’essence de la civilisation

Nous voyons la connaissance, la culture et l’éducation comme les moteurs de la civilisation. Ces moteurs ne peuvent être réduits en biens commercialisables ou en propriété privée.

Il n’existe pas de base d’inclusion de telles dispositions de propriété intellectuelle dans un accord commercial. De plus, toutes les nations ont la responsabilité et l’obligation de protéger la santé publique et le bien-être de leur peuple. Les règles courantes en matière de propriété intellectuelle dans les pactes commerciaux, comme l’Accord de l’OMC sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce, empêchent les personnes d’avoir accès aux médicaments essentiels, aux semences et aux nécessités de la vie, tout en donnant lieu à l’appropriation privée des formes de vie et de la connaissance traditionnelle et à la destruction de la biodiversité. Elles empêchent également les pays pauvres d’améliorer leurs niveaux de bien-être économique et social et de défendre leur identité et leur patrimoine particuliers. Par conséquent,

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Les gouvernements doivent conserver leur droit absolu de limiter la protection conférée par brevet afin de protéger l’intérêt public dans ces secteurs, particulièrement en rapport avec les médicaments, les semences et les formes de vie.
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Tous les régimes nationaux et internationaux doivent interdire le brevetage des formes de vie, y compris les micro-organismes.
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Il faut défendre la diversité culturelle authentique contre l’effet d’homogénéisation des marchés mondiaux et des monopoles sur la connaissance, la technologie et les télécommunications.

Préserver et faire avancer la souveraineté et la sécurité alimentaires

Nous affirmons que le droit à la nourriture est un droit humain fondamental. L’Accord sur l’agriculture de l’OMC subordonne ce droit à la rentabilité des sociétés. Le système alimentaire de l’OMC est construit sur une agriculture industrialisée et capitalisée, axée sur l’exportation qui élargit la concentration des sociétés le long de la chaîne alimentaire et affaiblit les moyens de subsistance, les droits, la santé et les conditions de vie et de travail des travailleurs agricoles et de l’alimentation, affaiblissant ainsi encore plus la sécurité alimentaire.

De plus, elles négligent de reconnaître que l’agriculture est un mode de vie et une base importante de la communauté et de la culture. Ainsi, leurs politiques et celles des autres accords commerciaux favorisent une concentration plus grande et une augmentation des pouvoirs des sociétés transnationales et causent l’expulsion de millions de paysans et de familles agricoles de leurs terres et de leur production, dans les pays du Nord et du Sud. Depuis l’introduction des « programmes d’ajustement structurel » et l’établissement de l’OMC, un grand nombre de paysans, de familles agricoles et de travailleurs agricoles ont dû quitter leurs terres et ont connu la faim, il y a eu beaucoup de suicides, à cause de la libéralisation des importations par l’entremise des réductions tarifaires, de l’abolition des restrictions quantitatives et de l’iniquité des politiques agricoles nationales. En même temps, un grand nombre de subventions destinées aux agro-entreprises, y compris l’agriculture industrielle d’exportation, ont augmenté plutôt que de diminuer.

Si ces règles permettent des entreprises commerciales d’agro-alimentaires de plus en plus puissantes pour faire baisser les prix des produits de base payés au agriculteurs du monde entier, la concentration de la distribution et du traitement des aliments en vertu des règles du secteur de l’agriculture et des services de l’OMC a donné lieu à l’augmentation du prix des aliments pour les consommateurs. Par conséquent :

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Pour éviter qu’on ait encore plus faim, que d’autres personnes soient expulsées de leur milieu de vie et que d’autres encore en meurent, il faut prendre des mesures immédiatement pour limiter les politiques agricoles, commerciales et d’investissement qui encouragent la surproduction chronique et interdire le dumping des marchandises agricoles sur les marchés mondiaux à un prix inférieur au coût de production par les sociétés alimentaires mondiales et les autres qui participent au commerce agricole mondial. Il faut interdire les subventions directes et indirectes des exportations qui donnent lieu au dumping. Les pays doivent conserver et réaffirmer leurs droits souverains de protéger leurs marchés et leurs secteurs agricoles du dumping afin de mettre en œuvre des mesures qui peuvent supporter efficacement et activement la production durable des paysans et des familles agricoles.
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Il faut prendre des mesures pour promouvoir et protéger la souveraineté alimentaire des peuples (le droit des peuples et des communautés de définir leurs propres politiques alimentaires et agricoles, et leur droit de produire leurs aliments de base d’une façon qui respecte la diversité culturelle et productive et supporte la production durable par les paysans et les familles agricoles) et la sécurité alimentaire pour les consommateurs et les producteurs.
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Les mesures qui concernent seulement la production pour la consommation domestique et qui ne contribuent pas à l’augmentation des exportations sur les marchés internationaux devraient être exemptées des accords commerciaux internationaux. Le système commercial ne doit pas affaiblir les moyens de vie des paysans, des familles agricoles, des travailleurs agricoles, des pêcheurs artisans et des autochtones.
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Nous croyons que le développement de la souveraineté alimentaire, de la sécurité alimentaire et de l’agriculture durable basée sur la production des paysans et des familles agricoles exige que les gouvernements reconnaissent les failles des principes du « libre-marché » qui étayent les avantages comparatifs perçus, le développement agricole d’exportation et les « politiques d’ajustement structurel » ; nous croyons qu’il faut remplacer ces politiques par d’autres qui accordent la priorité à la production locale durable et de subsistance, incluant l’utilisation de mécanismes de contrôle des importations et de réglementation qui assurent des méthodes de production plus équitables et durables.
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Il faudra diverses ententes pour atteindre ces objectifs. Elles pourraient inclure une convention sur la souveraineté alimentaire et l’agriculture durable et une déclaration des droits des paysans et des familles agricoles. Au bout du compte, l’OMC et les autres accords de « libre-échange », qui sont concentrés actuellement sur la libéralisation du commerce à tout prix, ne sont pas des endroits appropriés pour de telles règles ; par conséquent, il faut renforcer les autres espaces pour discuter de ces règles.

Stopper la mondialisation des entreprises et promouvoir le commerce équitable

Les règles commerciales de l’OMC, et celles de nombreux autres accords commerciaux régionaux existants et en train d’être négociés, favorisent le pouvoir des sociétés dans l’économie mondiale en fournissant de nouveaux droits en matière d’investissement, de propriété intellectuelle et autres. En même temps, elles perpétuent les politiques néo-libérales de privatisation et de déréglementation. Tout cela est fait sous prétexte de « libre-échange ». Ce déséquilibre des pouvoirs favorise l’intérêt économique personnel de quelques géants économiques mondiaux, en provoquant souvent des effets dévastateurs sur les économies locales, particulièrement dans les pays en développement.

Et le pouvoir des sociétés augmente encore par l’entremise des accords régionaux et bilatéraux sur le commerce et l’investissement. Leurs règles puissantes favorisent les droits des sociétés et menacent sérieusement le pouvoir démocratique local. Certains accords permettent maintenant en fait aux sociétés étrangères de poursuivre les gouvernements nationaux pour « pertes de profits » si une loi ou un règlement du pays réduit leur rentabilité présente ou future. Les droits environnementaux, sociaux et du travail cèdent tous le pas au droit des entreprises de faire du profit. Il faut renverser cette tendance.

Après avoir fait dérailler l’Accord multilatéral sur l’investissement, qui aurait enchâssé de tels droits pour les sociétés, nous réclamons la fin de la stratégie des entreprises qui consiste à promouvoir l’expansion rapide et imprudente des accords régionaux et bilatéraux sur le commerce et l’investissement qui essaient de renforcer le pouvoir vacillant de l’OMC. Nous réclamons aussi la fin des règles commerciales qui garantissent le droit de l’investisseur étranger à un profit en exposant les politiques domestiques de réglementation aux contestations des investisseurs et aux demandes d’indemnisation par les fonds publics.
Pour commencer à nous rapprocher d’un système de commerce juste, nous demandons aux gouvernements de négocier une entente exécutoire pour assurer que les sociétés sont tenues de rendre compte en démocratie des incidences sociales, économiques et environnementales de leur conduite, y compris le rôle que certaines jouent en supportant les régimes politiques répressifs et la commercialisation des armes. Cela devrait être accompli par l’entremise des Nations Unies et des autres organismes appropriés, avec la participation entière de la société civile.

Nous demandons de plus aux organismes et aux mouvements de la société civile d’entreprendre un dialogue mondial de la société civile sur l’élaboration d’un autre cadre commercial juste et durable pour remplacer le modèle néo-libéral, un cadre qui favorise vraiment le développement durable pour les peuples et qui est fondé sur des droits qui font passer les communautés en premier.

Nous voulons un système commercial durable, socialement juste et de responsabilisation en démocratie. Ainsi, nous demandons à nos gouvernements de commencer par mettre en oeuvre les changements énoncés dans le présent document afin de limiter et de diminuer le pouvoir et l’autorité de l’OMC, de changer le commerce et de créer un système juste. Nous nous engageons à mobiliser les personnes de nos pays, de nos régions et du monde à lutter pour ces demandes et à défier les politiques injustes de l’OMC et le grand système commercial multilatéral.

Le choix est difficile : ou nous acceptons l’ordre mondial courant centré sur les sociétés et nous abandonnons le bien‑être des prochaines générations et le futur de la planète elle-même, ou nous relevons le défi difficile de la mise en place d’un nouveau système centré sur les intérêts des personnes, des communautés et de l’environnement.




ATTAC-Québec